Politique

27-Mar-2020 Par

Virus révélateur

Non, le coronavirus ne reconnaît pas des privilèges, il n’a pas d’égard pour le renom, le statut, le revenu ou la fortune des individus qu’il touche. Pourtant, il n’est pas socialement neutre.

Virus révélateur

Non, le coronavirus ne reconnaît pas des privilèges, il n’a pas d’égard pour le renom, le statut, le revenu ou la fortune des individus qu’il touche. Pourtant, il n’est pas socialement neutre.

De même que la crise climatique, la crise virale ne frappe pas de la même violence selon que l’on est riche ou pauvre. « Tous les hommes n’habitent pas le monde de la même façon », selon le titre du roman de Jean-Paul Dubois, prix Goncourt de cette année.

Si le virus frappe inégalement, ce n’est pas sa faute. C’est la faute aux inégalités préexistantes à la pandémie. Et donc des politiques qui ont permis ou encouragé la montée de ces inégalités.

Sous le titre « Le virus de l’inégalité » Laurent Joffrin évoque dans « Libération », à titre d’exemple, les « classes supérieures » qui peuvent se permettre, à la différence des moins lotis, de fuir les grandes villes, et de se soustraire plus facilement à la contagion.

Et en effet. Les riches Parisiens déjà moins touchés dans leur vaste appartement du 16e, avec vue sur le bois de Bologne, avec les domestiques qui peuvent leur fournir à domicile homard et champagne, peuvent en plus s’enfuir vers leur villa isolée avec vue sur mer.

L’éboueur d’origine malienne, déjà plus menacé de contagion de par son travail, devra bien se résigner après ou hors travail au confinement dans son logement exigu en banlieue.

Le banquier de notre place financière aura plus de facilités d’éviter la contagion, de supporter le « confinement » et les autres restrictions de l’état de crise que la caissière de chez Cactus ou le la main-d’œuvre de chez Bonaria. Pas d’objection contre la promotion du télétravail, mais il ne s’offre pas à tout le monde et pas de la même façon.

Le chômage partiel est certes une mesure pour permettre la survie des entreprises et de maintenir l’emploi. Pourtant, la réduction du salaire frappera le plus durement les salarié/es à bas revenu.

La fermeture des écoles et des crèches sera supportée plus aisément par les uns que par les autres. Les familles les plus aisées seront capables de fournir à leurs enfants une éducation adaptée à domicile – avec ou sans gouvernante. Il en va autrement de la femme monoparentale, salariée ou sans emploi, ou des familles ouvrières portugaises qui n’ont que peu de moyens de suppléer à l’école publique.

Et en bas de l’échelle, toutes/tous les « sans » : sans-domicile, sans-papier, sans voix …

Bien sûr, les autorités politiques et sanitaires ont raison d’insister sur la protection des plus vulnérables. Sauf qu’il serait bon de rappeler que la vulnérabilité n’est pas seulement une question d’âge, mais aussi une question sociale. Et que, la crise dépassée, il faudrait s’en souvenir – et donc tout faire pour réduire ces inégalités.

Heureusement au moins, notre premier ministre, pour souligner l’urgence d’agir, à préféré la métaphore de la course à la rhétorique martiale du président français : « Nous sommes en guerre … contre un ennemi invisible ». On se souvient d’une « Union sacrée » de sinistre mémoire pour justifier un nationalisme guerrier en même temps que d’étouffer les conflits sociaux et l’esprit critique. Non, nous ne sommes pas en guerre, et un virus n’est pas un ennemi, déjà pour la simple raison que la comparaison pourrait être (et a été) inversée : « l’ennemi » extérieur ou intérieur, parfois invisible est comme un non-humain, un parasite, ein Schädling.

Non, le virus, n’a pas été inventé par « le capitalisme ». Par contre, la dynamique d’accumulation, la domination du capital financier, l’obsession de la rentabilité, ont favorisé l’étirement des chaînes de production à travers le monde, à la recherche des coûts de production les plus faibles, des salaires les plus bas et des contraintes environnementales les plus basses. Les délocalisations si bénéfiques pour les actionnaires et si néfastes pour les travailleurs, révèlent leur pleine toxicité en cas de crise – sous la forme, par exemple, du manque de médicaments.

La surcharge des hôpitaux – notamment en France et en Italie – était dénoncée bien avent le virus par les personnels médicaux et paramédicaux. L’austérité néolibérale a empêché des rémunérations et des conditions de travail acceptables pour les personnels soignants – alors que les actionnaires empochent les dividendes. Si, au Luxembourg, la situation ne paraît pas encore aussi dramatique qu’en France, la logique financière n’a pas épargné ni la structure hospitalière, ni les autres secteurs de soin. Le régime d’accumulation néolibéral tend à la fois à réduire le poids de la puissance publique (et donc, notamment, des impôts redistributifs) et à s’accaparer les secteurs non encore marchands.

C’est pourtant la puissance publique, la mal-aimée et mal pourvue, qui est appelé à la rescousse en cas de crise. Il y a 10 ans, pour sauver les banques, maintenant pour protéger la population et maintenir en marche, tant bien que mal, l’économie.

« Depuis des décennies, nos services publics sont abîmés, dégradés, brocardés. Mais c’est toujours l’État qui vole au secours des banques, ‘too big to fail.’ Ce sont toujours les services publics et leurs agents qui sont en première ligne lorsque les crises arrivent », écrit la philosophe Dominique Méda (Libération du 18 mars).

Et de conclure : « … nous devons en effet engager des ruptures majeures. Rupture avec un capitalisme débridé qui est à l’origine de la situation dans laquelle nous nous trouvons… »

Pour cette rupture, il ne faut manifestement pas nous fier à celles et à ceux qui nous l’avaient déjà promise lors de la crise financière de 2008.

 

André Hoffmann

25/03/2020

Politique

27-Mar-2020 Par

Les indispensables dévoilés

Cette crise sanitaire a au moins un mérite : celui de remettre sur le devant de la scène la question de l’utilité sociale et de la remise en cause de la logique marchande et – Luxembourg oblige – de son pendant financier.

Les indispensables dévoilés

Cette crise sanitaire a au moins un mérite : celui de remettre sur le devant de la scène la question de l’utilité sociale et de la remise en cause de la logique marchande et – Luxembourg oblige – de son pendant financier.

L’avantage dans les crises – si l’on peut parler d’avantages dans le contexte actuel – c’est qu’elles jettent une lumière crue sur la réalité. On parle d’apocalypse, de manière évidemment abusive, dans le sens de « fin du monde ». Mais en effet, nous assistons à une apocalypse dans le sens originel du terme : il s’agit du « dévoilement ».

Dévoilement de la nature de l’Union européenne, dont la seule décision sensée de ces derniers jours a été de mettre entre parenthèses la rigueur budgétaire, donc de revenir sur un de ses piliers fondamentaux.

Dévoilement au niveau des relations internationales : tandis que l’allié états-unien tente de s’arroger le monopole de la recherche scientifique et de possibles traitements, ce sont les « pestiférés » tels que Cuba qui prêtent main forte aux pays d’Europe occidentale. Il s’agit évidemment de ne pas être naïf : l’aide de la Chine est elle aussi intéressée. Mais le propos de cet article n’est pas de s’attarder sur les considérations géopolitiques.

Dévoilement des modèles économiques : que des pays économiquement libéraux tels que le Royaume-Uni ou les Pays-Bas – modèles encensés il y a peu – choisissent « l’immunité de groupe », en dit long sur la faiblesse structurelle de leur système de soins.

 

Dévoilement aussi au Luxembourg.

 

Allons droit au but : c’est dans ce moment de crise que l’on se rend compte des métiers indispensables à la survie d’une société. Les travailleurs et travailleuses des soins et santé, évidemment. Les agents de nettoyage, les travailleurs du commerce, aussi.

Petite parenthèse : n’oublions pas non plus l’importance des fonctionnaires de l’État ou des communes. Bien que moins précaires économiquement, ils sont systématiquement confrontés, pêle-mêle, aux accusations de paresse, d’inefficacité, et, parfois même, d’inutilité. Ils prouvent actuellement que le contraire est vrai.

En revanche, d’autre activités tenaient jusqu’à présent le haut du pavé au Luxembourg : les « winners », les représentants de la « modernité » que seraient les optimisateurs fiscaux, la branche des fin-tech, bref ce qu’on ne cesse de nous vendre comme étant les représentants de ce nouveaux monde « dépoussiéré » de vieilleries comme les droits sociaux et les avancées du droit du travail.

Mais les faits sont têtus, comme le disait Lénine : qui du fiscaliste ou de l’infirmière a le plus besoin l’un de l’autre ? Qui de la caissière ou de l’avocat d’affaires a le plus besoin l’un de l’autre ? Qui applaudit-on aux balcons et aux fenêtres à 20 heures ?

La perversité de notre système économique est évidente : tandis que l’optimisateur fiscal gagne son argent en conseillant au mieux à la société de nettoyage comment éviter l’impôt, c’est la travailleuse de cette même société, sous-payée évidemment, qui se chargera de la propreté de son lieu de travail. Indirectement, mais de manière très réelle, l’optimisateur fiscal aura, quant à lui, contribué à la précarité de la travailleuse du nettoyage.

 

Pas logés à la même enseigne

 

Et alors que les gouvernements luxembourgeois successifs n’ont eu de cesse de chouchouter ces acteurs de l’évitement fiscal des très riches, ils n’ont pas eu la moindre considération envers les plus pauvres et néanmoins les plus utiles socialement.

Je pourrais ici énumérer longuement la ribambelle de projets de loi liés à la place financière auxquels nous avons dû prendre position au parlement – souvent dans l’indifférence générale – et qui faisaient la part belle aux intérêts de l’oligarchie financière.

Je pourrais également énumérer le nombre de fois où déi Lénk, aussi bien au sein de la Chambre qu’en-dehors, a pris position quant au traitement scandaleux des travailleuses du nettoyage (puisqu’il s’agit principalement de femmes), qu’il s’agisse du refus de leur octroyer le salaire minimum qualifié après dix années de service (et c’est encore bien en deçà de ce qu’elles méritent) ou du non-respect de leurs droits.

Et que dire de la lutte des salarié-e-s du Cactus, encore toute récente ? Grâce à une exceptionnelle mobilisation syndicale emmenée par l’OGBL, cette mobilisation a réussi à rencontrer la sympathie de nombreux citoyens. Mais ce succès n’est pas tombé du ciel : sans le « haut patronage d’eux-mêmes », il n’aurait pas été possible.

Et pourtant, les salarié-e-s des grandes surfaces, Cactus inclus, continuent à faire leur devoir malgré des salaires et des conditions de travail qui se situent à des années lumières de leur utilité sociale.

« Sous le haut patronage de nous-mêmes »

C’est également sous le patronage d’eux-mêmes que les personnels des soins et de santé ont dû batailler ferme dans les divers secteurs et sur plusieurs années afin d’accéder à la reconnaissance de leurs droits.

Hormis les fonctionnaires, on constate que celles et ceux qui fournissent une grande partie des métiers indispensables partagent plusieurs points communs : elles sont majoritairement des femmes, ils et elles sont sous-payé-e-s, ils et elles sont très souvent frontaliers.

A tout malheur, quelque chose est bon : la propagande des nationalistes de la langue s’est éteinte ou presque. Rappelons tout de même leur revendication principale : l’obligation, pour les salarié-e-s frontaliers et frontalières (et, pour être clair, les francophones) de maîtriser le luxembourgeois sur leur poste de travail. Hormis le fait que beaucoup d’entre elles et d’entre eux comprennent – par la force des choses – les rudiments de la langue luxembourgeoise, imaginons un instant dans quelle situation catastrophique nous nous trouverions actuellement si cette revendication avait été réalisée.

Nous nous rendons compte que, contrairement à ce que prétendent les nationalistes de la langue, les frontaliers francophones ne constituent pas une menace pour l’existence du pays, mais, qu’au contraire, ils font partie de la solution.

 

David Wagner

25/03/2020

Politique

27-Mar-2020 Par

Une remise en question fondamentale

Le choc brutal du coronavirus a abouti à une mise à l’arrêt de l’économie mondialisée et des rouages de la vie quotidienne. C’est un coup de semonce et une opportunité pour repartir sur de nouvelles bases.

Une remise en question fondamentale

Le choc brutal du coronavirus a abouti à une mise à l’arrêt de l’économie mondialisée et des rouages de la vie quotidienne. C’est un coup de semonce et une opportunité pour repartir sur de nouvelles bases.

Avec la crise actuelle, des vérités à présent indéniables éclatent au grand jour:
– Le Luxembourg est extrêmement vulnérable et son bien-être douillet est en fait construit sur du sable. Que vaut la notation financière “AAA” de Standard & Poor’s face à la réalité que le bon fonctionnement de notre économie dépend en grande partie des 200.000 salariés français, belges et allemands qui viennent travailler chez nous tous les jours et que 70% du personnel de santé sont des frontaliers ? Que se passerait-il en effet en cas de fermeture des frontières ou d’un réquisitionnement du personnel de santé par leurs Etats d’origine ? Quelle contribution à la survie fournit un secteur financier surdimensionné tourné vers l’optimisation fiscale aux dépens d’autres pays ? Qu’adviendra-t-il des recettes fiscales en cas de plongée de la valeur des fonds de placement ou d’une réglementation plus stricte des flux financiers ?
– L’idéologie néolibérale, qui a conduit au démantèlement systématique des piliers de l’Etat , dont tout particulièrement le système de santé publique, est à la base de la misère hospitalière actuelle dans nombre de pays développés. C’est aux instigateurs politiques des calculs d’utilité économique qu’incombe la responsabilité de milliers de morts supplémentaires dus aux manque d’équipement et de personnel.
Les effets dévastateurs du manque de protection sociale et sanitaire seront particulièrement forts aux Etats-Unis et probablement catastrophiques dans les pays du Tiers monde.
– Le besoin d’un Etat économiquement, financièrement et socialement fort, capable de prendre les choses en main et de protéger les individus à tous les points de vue se fait ressentir plus que jamais. Voici que même les hérauts les plus fervents du libre marché revendiquent des plans de sauvetage par des deniers publics, alors qu’il y a quelques semaines encore, ils ont exigé de poursuivre la réduction de la charge fiscale des entreprises. La tempête passée, assumeront-ils que pour mener une politique économique efficace, les pouvoirs publics doivent disposer des moyens nécessaires ?
– Comme jamais auparavant, l’Union européenne fait figure de parent pauvre. Le repli des États de l’Union sur leurs frontières nationales est à l’image du manque d’impact de cette institution au niveau social. Depuis le traité de Maastricht et la mise en place du marché unique et davantage encore depuis la réalisation de l’Union économique et monétaire, l’UE est apparue comme le fer de lance du neolibéralisme et le moteur de l’anéantissement des systèmes de solidarité nationales à travers les clauses restrictives du Pacte de stabilité, sans y substituer des solidarités européennes.
– Au niveau international et intercontinental, la crise sanitaire actuelle préfigure en raccourci ce que seront les effets de la crise climatique à venir. Elle nous signifie de manière brutale la faillite du modèle actuel de mondialisation, basée sur l’exploitation individualiste et sans ménagement des hommes et de la nature au nom du profit à court terme et elle constitue dès lors un coup de semonce ultime pour changer résolument de cap.

 

Faire face à une récession majeure et changer de modèle économique

 

Pourtant, la crise sanitaire passée, il serait naïf de penser qu’on se réveillera dans un monde guéri des mésaventures du passé et en rupture idéologique avec le neolibéralisme !

Anticiper la crise économique profonde qui se présentera dans quelques mois demande alors de mettre dès maintenant en place des plans de relance tant nationaux qu’européen pour éviter que les “petits” paient une nouvelle fois les pots cassés. Dans le même sens, il est impératif de repenser de fond en comble la politique européenne, de mobiliser tous les instruments budgétaires et monétaires disponibles et d’aider collectivement les Etats et les régions les plus fragiles.

Combattre le tout-marché exige de reréglementer les flux financiers, de remettre en cause les privatisations des services publics et des banques, y compris la sortie de la Banque centrale européenne de tout contrôle démocratique et de renforcer les dépenses et les investissement publics, notamment au niveau de la recherche fondamentale.

S’opposer au désastre futur de la crise écologique tout en luttant contre les inégalités, demande d’un côté de sortir de l’économie-carbone, de protéger la biodiversité, de réduire les chaînes de production, de soumettre les traités de commerce à des critères de transition écologique et de protection sociale et de l’autre, de renforcer les piliers de l’Etat social que sont le droit au travail, la sécurité sociale et les services publics.

Faire face aux ravages de la pandémie dans les pays du Tiers monde et aux flux migratoires demande d’apporter une aide d’urgence, de mener une politique de développement consistente et de conclure des traités d’échange commerciaux équitables.

La rupture avec les principes néfastes du néolibéralisme impliquera une imposition renforcée des revenus du capital ainsi que des patrimoines.

Au niveau luxembourgeois, il faudra surtout sortir l’économie de la dépendance de la place financière, mobiliser d’autres branches économiques et développer la politique régionale.

Il s’entend évidemment que “si nous voulons amorcer un véritable revirement politique pour sortir de la crise sociale, il ne suffit pas de dicter des changements d’en haut. Il s’agit plutôt d’établir un rapport de force progressiste au sein de la société, qui permette des changements politiques de grande ampleur.(1) »

 

(1) Sortir du piège systémique en misant sur des solutions de gauche (Extrait de la proposition de résolution pour le 17e congrès de déi Lénk qui était prévu pour le 29 mars, mais qui a dû être reporté en raison de la pandémie du Coronavirus)

 

Guy Foetz

25/03/2020

Politique

28-Fév-2020 Par

Le CNE et l’eugénisme associatif

Le GDP per capita du Luxembourg était, en 2018, de presque 100.000€ par personne. Le budget du CNE est de 20.000€ pour l’année de 2020 : 0,0001% du total du budget d’état pour 2020. Pour le gouvernement, la voix de chaque étranger résident ne vaut que 7 centimes de l’euro.

Le CNE et l’eugénisme associatif

Aujourd’hui, le 28 février 2020, jour par jour, il fait 2 ans que les membres actuels du CNE ont eu sa première réunion « pour le vrais », après avoir eu élu son président et vice-président dans une première réunion aillant lieu le 23 janvier précèdent. Ce 28 février, il y a deux ans, Mme le Ministre était présent à la plénière pour demander à ‘notre’ tout neuf CNE de se prononcer dans un délai de 15 jours sur le Plan d’action national d’intégration. Des 34 membres du CNE, il avait 26 qui se sont présentés.

Plus récemment, une lettre du Ministère de l’Intégration daté du 14 février a été envoyé par courrier électronique le 17 février. Cette lettre avait par destinataires les associations inscrites auprès du Département de l’Intégration, du ministère en question, en tant qu’électrices du Conseil National pour Étrangers – CNE. Il y était requis que les associations fournissent au Département ministériel « la liste des administrateurs désignes en conformité avec les statuts pour l’exercice en cours ; la liste actuelle des membres ; le plus récent rapport d’activité de votre association ». Cette requête, la missive prône, est faite en accord avec le règlement grand-ducal du 15 novembre 2011 portant détermination des modalités de désignation des représentants des étrangers au CNE. Cette demande est à remplir avant le 28 février, sachant que « [les] associations qui ne donnent pas suite à cette demande ou qui transmettent des dossiers incomplets seront rayées d’office du registre tenu auprès du Département de l’intégration ». Il commence à se dessiner un motif ici, des demandes à 15 jours.

En réponse à une question parlementaire du député Marc Baum, déi Lénk, Mme la ministre Corine Cahen informe que « un courrier sera envoyé aux associations pour prolonger de 15 jours ouvrables le délai de réponse initial ». La réponse donnée par la responsable gouvernementale pour le secteur de l’intégration nous informe aussi que la raison pour le court délai initial était due à « la nécessité de remplacer des membres démissionnaires et en raison de l’urgence invoquée par la présidence du Conseil national pour étrangers ».

Une première lecture de tout cette affaire ne nous permet pas voire rien d’étrange. Néanmoins, et avec une analyse plus fine, rapidement ressortit que la ‘chose’ n’est pas si simple.

Voyons alors par parts.

Le règlement en cause détermine quelles sont les associations ayant le droit de voter les membres de la partie élue du CNE (à savoir que des 34 membres du CNE, 22 sont élus et 12 nommées par le ministre de la tutelle, sous proposition des partenaires sociaux). Le règlement en cause établi que : sont électrices « les associations des étrangers ayant une activité sociale, culturelle ou sportive, l’association des étrangers étant celle dont soit la majorité des membres fondateurs, soit la majorité des membres actuels, sont d’une nationalité autre que luxembourgeoise » et « les associations œuvrant, à titre principal, en faveur des étrangers ».

Or, je croix de ne pas trop risquer si j’avance que le nombre d’associations qui remplissent ces deux critères dénombrent, sûrement, bien plus que cinq centaines. La question qui s’impose est : combien d’associations sont électrices du CNE ? Le 8 juillet 2017, le jour où les membres actuels du CNE ont été élus, cette liste comptait avec 55 associations. La démarche de la mise à jour des fichiers du Ministère, tombant sur une période de vacances scolaires et dans les deux semaines qui précèdent le festival des migrations ne peut avoir une conséquence autre qu’une ‘nettoyage’ de la liste d’électeurs.

Il faut aussi poser la question sur les raisons qui ont emmené les services du ministère à ne pas rendre cette démarche accessible à TOUTES les associations qui peuvent devenir électrices du CNE. Il appartient au ministère d’entretenir cette liste et, bien sûr, de promouvoir la participation aux élections du CNE. Rappelons-nous que le seule rôle du CNE n’est que « d’étudier, soit de sa propre initiative, soit à la demande du Gouvernement les problèmes concernant les étrangers et leur intégration [ ; sur] tous les projets que le Gouvernement juge utile de lui soumettre, [donner] son avis dans les délais fixés par le Gouvernement [ ;] de présenter au Gouvernement toute proposition qu’il juge utile à l’amélioration de la situation des étrangers et de leur famille [ ; et de remettre au Gouvernement] un rapport annuel sur l’intégration des étrangers au Luxembourg» Il n’appartient pas au CNE de gérer la liste des électeurs. D’ailleurs parce qu’il n’appartient même pas au CNE d’organiser sa propre élection.

Sur le fonctionnement du CNE, il faut dire que pendant toute l’année de 2019 le taux d’absentéisme des membres du CNE était de 48% (40% pour les élus, et 64% pour les nommées). Soit pour les élus, soit pour les nommées plus que la moitié des absences n’ont jamais étais justifiés (respectivement 56% et 54%). Il y a même 5 membres que ne se sont pas présentés dans aucune des réunions plénières. À ceux nous pouvons rajouter 3 démissionnaires, de la part des nommées, qui n’ont toujours pas était remplacés. Plus de la moitié des membres ne se s’ont pas présentés à plus que la moitié des réunions. Le niveau de participation entre la première et la dernière réunion de 2019 descend de 22 à 9. C’est la 4ème fois, d’affilée, que le plénière du CNE n’as pas de quorum et la réunion doit être remporté à la semaine suivante. L’argument de l’urgence est, donc, totalement incompréhensible. L’urgence est là depuis quelques mois et elle était même soulevée en plénière le 18 septembre 2019. Presque une demi-année après toute urgence est vide de sens. Aussi, il ressort du règlement mentionné ci-haut que « [la] liste des inscriptions est révisée annuellement ». A moins que cette révision n’aille pas été faite en 2018 et 2019 il devient encore moins compréhensible toute cette urgence, encore plus tout en prévoyant les possible conséquences.

(*réunion en deuxième convocation)

Les raisons pour ce taux d’absentéisme croissant sont plusieurs et divisibles entre endogènes et exogènes. La total anarchie avec les dates et horaires des réunions sera une des plus importantes. A titre d’exemple, nous pouvons mentionner, à la fois l’incapacité interne de tenir avec les décisions concernant les horaires et la cadence des dates pour les réunions, mais aussi l’impossibilité des certaines dates vu l’indisponibilité du secrétaire mis au service du CNE par le ministère de l’intégration. Un fonctionnaire ministériel est un être humain et a aussi une vie personnelle – c’est justement aussi pour cela que les ministères ont plusieurs fonctionnaires.

Le modèle du Conseil National pour Étrangers avec une majorité de membres étrangers était une conquête après plusieurs années de lutte par les associations des étrangers du Luxembourg. Ce modèle est désormais en risque. Avec une élection parvenue en juillet après un appel à candidatures et inscriptions pour la liste d’électeurs faite de façon assez discrète cette dernière démarche aura, sûrement, comme résultat, de rayer des ‘cahiers électorales du CNE’ les associations des étrangers du Luxembourg. Il aura, presque, aucune autre que celles « œuvrant, à titre principal, en faveur des étrangers » malgré le fait que son corpus associatif n’aille pas « [la] majorité des membres actuels [avec] d’une nationalité autre que luxembourgeoise ».

Empêchés pour des décennies d’avoir accès au vote pour les élections législatives, les étrangers n’ont que le CNE pour faire valoir sa voix auprès des autorités au Grand-Duché du Luxembourg. Maintenant la démarche est de continuer à vider la légitimité de ce Conseil. Comme des écuyers jetés par terre derrière la chaise du maitre après les avoir servis toute la journée, les étrangers, politiquement, n’ont qu’à attendre les miettes qui peuvent tomber de la grande table.

Le GDP per capita du Luxembourg était, en 2018, de presque 100.000€ par personne. Le budget du CNE est de 20.000€ pour l’année de 2020 : 0,0001% du total du budget d’état pour 2020. Pour le gouvernement, la voix de chaque étranger résident ne vaut que 7 centimes de l’euro.

Zu den politischen Kräfteverhältnissen in der EU und zur Situation der Linken in Europa

Zu den Meldungen 2014 gehörten u.a.: das Inkrafttreten von Obamas Gesundheitsreform, die Besetzung der Krim, die Wiederwahl des Ungarischen Regierungschefs Victor Orban nun mit Zweidrittelmehrheit, die Wahl Matteo Renzis (PD) zum Ministerpräsidenten Italiens, der Ausbruch von Ebola, der Gaza-Krieg, das Ausrufen des Kalifats in Syrien durch den IS (Islamischer Staat), die Vertreibung der Jesiden, das schottische Referendum, die Enthüllungen von Edward Snowden zum NSA, der Beginn der Pegida-Demonstrationen im Dezember 2014.

Zu den politischen Kräfteverhältnissen in der EU und zur Situation der Linken in Europa

1. 2019 − eine neue Situation?

Zu den Meldungen 2014 gehörten u.a.: das Inkrafttreten von Obamas Gesundheitsreform, die Besetzung der Krim, die Wiederwahl des Ungarischen Regierungschefs Victor Orban nun mit Zweidrittelmehrheit, die Wahl Matteo Renzis (PD) zum Ministerpräsidenten Italiens, der Ausbruch von Ebola, der Gaza-Krieg, das Ausrufen des Kalifats in Syrien durch den IS (Islamischer Staat), die Vertreibung der Jesiden, das schottische Referendum, die Enthüllungen von Edward Snowden zum NSA, der Beginn der Pegida-Demonstrationen im Dezember 2014.

Betrachtet man diese Meldungen heute im Jahr 2019, so verweisen sie auf Kontinuitäten, Veränderungen von Entwicklungen, deren Rückwirkungen auf die politischen Landschaften zum Teil erst im Verlaufe der letzten vier Jahre bedeutsam wurden.

Weltweit und auch in Europa haben sich die Kräfteverhältnisse verändert. Mit Trump, Erdogan, Bolsonaro, Kurz, Salvini oder Orban kamen Menschen in das höchste Amt ihrer Länder, die ihrerseits Demokratie geringschätzen oder offen in Frage stellen. Sie betreiben aktiv die Durchsetzung eines autoritären Kapitalismus. (vgl. Candeias/Bussemer, 2019)

Verantwortung für globale Probleme wie Klimaerwärmung, Naturzerstörung wird von ihnen nicht mehr übernommen. Auf eine Politik des Dialogs folgt eine neue Welle der Militarisierung bis hin zu neuer nuklearer Bewaffnung. Das soziale, politische und kulturelle Auseinanderdriften von Gesellschaften wird in Kauf genommen oder durch weitere soziale Kürzungen mit befördert. Zäune und Mauern sollen helfen gegen weltweite Migration infolge von Krieg, Hunger, Armut und Umweltzerstörung. All dies wird getragen von neuen und alten Konservativen und einer sich etablierenden autoritären und extremen Rechten, auch in Europa.

Auch die EU hat sich verändert. Die Bearbeitung der Krise 2008/2009 führte zu einem Schub der Europäisierung von Finanz- und Haushaltspolitiken durch Schuldenbremse, Kontrolle der nationalen Haushalte insbesondere der Eurozone und zur Herausbildung neuer europäischer Instrumente, wie Eurogroup (Treffen der Finanzminister der Euro-Staaten) oder Europäisches Semester (Überprüfung der nationalen Haushalts- und Reformentwürfe, bevor diese von den nationalen Parlamenten beschlossen werden). Mit der Politik der Memoranden wurde in Griechenland erstmals erfolgreich eine Methode der radikalen Außerkraftsetzung nationaler Souveränität und der bedingungslosen Unterordnung von Sozialpolitik unter die Haushalts- und Finanzpolitik praktiziert. Seit Jahren bestimmt sozialstaatlicher Rückbau, die Privatisierung öffentlicher und sozialer Infrastrukturen die herrschende Politik. Europaweit werden die Liberalisierung und Deregulierung der Arbeitsmärkte durchgesetzt und dies mehrheitlich von konservativen, sozialdemokratischen oder sozialistischen Parteien. Aber diese Aushöhlung von Demokratien auch hinsichtlich ihres sozialen Gehalts wirkt zugleich auch auf die politischen Systeme und verändert sie national und europäisch.

2. Veränderung der politischen Kräfteverhältnisse

Dies zeigte sich bereits bei den Europawahlen im Jahr 2014. Die beiden großen Parteienfamilien: Konservative und Sozialdemokraten/Sozialisten verloren deutlich an Zustimmung infolge der von ihr betriebenen Politik des Sozial- und Demokratieabbaus und der Unfähigkeit auf neue globale Herausforderungen adäquat zu reagieren. Die sich seit 2014 abzeichnende Tendenz verstärkte sich vor allem in den Kernländern der EU bis 2019 bei den nationalen Parlaments- und Präsidentschaftswahlen. Nach derzeitigen Umfragen zu den Europawahlen würden Konservative und Sozialdemokraten/Sozialisten je ca. 50 Sitze im Europäischen Parlament auch infolge der Verluste in ihren Ländern verlieren.

Ein Teil der früheren konservativen oder sozialdemokratischen Wählerschaft orientierte sich in den nördlichen Teilen Europas eher rechts, während der Protest gegen europäische Austeritätspolitik im europäischen Süden deutlich nach links ging, vor allem mit Blick auf die Wahlergebnisse der Linken in Spanien, Portugal und natürlich Griechenland. Eine solche vereinfachende Nord-Süd-Teilung gibt es 2019 nicht mehr, spätestens mit dem Erstarken der politischen Rechten in Spanien zeigt sich, dass mit dem Aufbrechen neuer Konflikte wie in Spanien die Frage der Autonomie Kataloniens die Proteste auch von rechts eingebunden werden können, vor allem dann, wenn Antworten der Linken ausbleiben oder widersprüchlich sind. Auf die nachlassende Dynamik und Bindungskraft von Parteien der radikalen Linken soll später differenzierter eingegangen werden.

Wirft man derzeit einen Blick auf die im Europaparlament vertretenen Parteifamilien bzw. Fraktionen, so liegt der Anteil jener Parteien, die theoretisch für ein linkes Lager stehen, gegenwärtig mit Linken, Grünen und Sozialdemokraten/Sozialisten bei ca. 35 %. Dabei liegt der Anteil der Sozialdemokraten/Sozialisten bei Umfragen zu den Europawahlen derzeit bei 20,64 % – vor allem dank der britischen Labour-Party und der spanischen Sozialisten. Der Anteil der radikalen Linksparteien mit derzeit 6,92% genau bei ihrem Ergebnis von 2014, der Anteil der Grünen mit 7,99% etwas über ihrem Ergebnis von 2014 (6,66%).

Die Liberalen gewinnen dank der Entscheidung Macrons mit „En March“ sich diesen zuzuordnen, um unter diesem „Dach“ dominierende Kraft zu sein. Ihr Anteil beträgt derzeit 16,3% in den Umfragen.

Die eigentlichen Gewinner der Wahlen auf nationaler Ebene seit 2014 sind die Rechtsparteien. Ihr Anteil wuchs zwischen 2017 und 2018 doppelt so schnell wie jener der Linken. Dieser Anteil umfasst heute, wenn man auf europäischer Ebene die Fraktion der Euroskeptiker und Nationalkonservativen (EKR) mit derzeit 11,85%, die Fraktion der Rechtspopulisten und extremen Rechten (ENR) mit derzeit 13,05%, die Europaabgeordneten der FIDESZ und die möglichen Abgeordneten der spanischen VOX und weitere Fraktionslose – wie die Vertreter der faschistischen Jobbik zählt, insgesamt ca. 27%1.

Rechtspopulistische, nationalkonservative oder zur extremen Rechten offene Rechtsparteien, die nachfolgend als Rechtsparteien zusammengefasst werden, mit starken nationalistischen oder völkischem Flügel sind stärkste oder zweitstärkste Parteien oder Teil der Regierung in Belgien, Frankreich, Österreich, in den Niederlanden, in Polen, Schweden, Slowenien, Tschechien und Ungarn. Dieser nationalistische Trend wird sich nach den Europawahlen 2019 auf europäischer Ebene noch deutlicher zeigen als bisher.

Cornelia Hildebrandt, Diplom-Philosophin, wiss. Referentin für Parteien und soziale Bewegungen im Institut für Gesellschaftsanalyse der RLS und stellvertretende Direktorin des Institutes;

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1 Die Zahlen wurden übernommen von Der (europäische) Föderalist vom 9.5.2019. https://www.foederalist.eu

Politique

29-Mar-2019 Par

La gratuité, cet obscur objet du désir

Les gauches mondiales sont largement orphelines de grands projets émancipateurs, ce que le philosophe marxiste Ernst Bloch nommait des principes espérances, capables de servir de boussole sur le long terme et de donner du grain à moudre pour nos combats quotidiens. Elles ne sont pas encore remises d'une triple tragédie, celle du « socialisme réellement existant », faux nez du stalinisme, celle de la social-démocratie reconvertie en social-libéralisme et celle du mouvement coopératif, mutualiste récupéré par le capitalisme. Dans quelle mesure la gratuité peut faire partie d'un nouveau projet de gauche qui est à la hauteur des défis sociales et écologiques d'aujourd'hui?

La gratuité, cet obscur objet du désir

Les gauches mondiales sont largement orphelines de grands projets émancipateurs, ce que le philosophe marxiste Ernst Bloch nommait des principes espérances, capables de servir de boussole sur le long terme et de donner du grain à moudre pour nos combats quotidiens. Elles ne sont pas encore remises d’une triple tragédie, celle du « socialisme réellement existant », faux nez du stalinisme, celle de la social-démocratie reconvertie en social-libéralisme et celle du mouvement coopératif, mutualiste récupéré par le capitalisme. Le socialisme andin avait certes redonné du sang vif à nos valeurs mais une série de défaites historiques montrent que nous campons encore au milieu du gué. Nous ne sommes pas, cependant, démunis puisque nous avons toujours dans notre musette des concepts essentiels pour penser, agir et rêver le monde de demain. La lutte contre l’exploitation capitaliste et les dominations en forme l’ossature. Le XXe siècle nous a appris que la question du pouvoir est centrale, celle de l’Etat et des titulaires du pouvoir, mais plus largement celle de l’hétéronomie. Le XXIe siècle nous rappelle que nous devons remettre la question des styles de vie alternatifs au cœur de la praxis révolutionnaire pour tenir compte de la crise écologique et des limites qui existent à une croissance économique sans fin. C’est plutôt une bonne nouvelle car cela devrait permettre paradoxalement d’en finir avec toute idée de sacrifice justifié au nom des lendemains qui chantent (puisque tout sacrifice imposé aboutit au renforcement du pouvoir). C’est plutôt une bonne nouvelle car la planète est déjà bien assez riche pour permettre à huit milliards d’humains de vivre bien, car ce n’est pas le manque de richesses (PIB) qui explique la régression sociale mais les inégalités sociales, pas plus que ce n’est un régime alimentaire trop carné qui serait responsable de la faim dans le monde mais la logique de l’industrialisation agricole capitaliste.

Les gauches mondiales ne pourront renouer avec l’espoir qu’en passant des combats défenseurs, c’est-à-dire des passions tristes, aux passions joyeuses, donc aux alternatives qui nous rapprochent du type de société désiré ! Le principe même de sécurité sociale allait initialement dans ce sens, en évoquant une sécurité sociale en matière de santé, de logement, d’alimentation, etc.

Gilles Deleuze disait que seul le désir (le grand désir de vivre) est révolutionnaire, nous devons donner envie, montrer que c’est possible, faire que chacune de nos conquêtes élargisse le domaine d’une vie post-capitaliste.

L’OIG a lancé pour cela une mobilisation prolongée en faveur de la gratuité, en publiant en septembre 2019 l’inventaire des formes de gratuité existantes et à venir (Gratuité vs capitalisme, Larousse, 2019), en lançant en novembre l’appel Vers une civilisation de la gratuité, la bonne surprise fut qu’il a été signé par tout ce que les gauches comptent de familles, de courants et de sous-courant. Ce succès s’explique paradoxalement par le fait que nous avons mis la barre très haute en ne parlant pas seulement de la gratuité comme une réponse à l’urgence sociale mais du passage nécessaire à une véritable civilisation de la gratuité. Le maître mot du Forum international de la gratuité qui s’est tenu en France le 5 janvier 2019 et a connu un grand succès a été « Construire la gratuité ». La gratuité doit être en effet construite dans tous les domaines, économiquement bien sûr puisque la gratuité ce n’est pas le produit débarrassé du coût mais du prix, ce qui pose bien la question de son financement, donc d’une fiscalité juste. Cette longue marche vers la civilisation de la gratuité est aussi à construire politiquement, juridiquement, socialement, culturellement. C’est pourquoi nous proposons trois règles fondamentales qui constituent la grammaire de la gratuité.

Première règle : la gratuité doit concerner tous les domaines de l’existence et pas uniquement ce qui est nécessaire à la survie comme l’eau vitale par exemple. Deuxième règle : si tous les domaines de l’existence peuvent devenir gratuits, tout ne peut être gratuit et pas d’abord par réalisme économique, mais parce que la gratuité doit être au service d’un projet de civilisation émancipatoire. C’est pourquoi nous proposons un nouveau paradigme valable dans tous les domaines, celui de la gratuité du bon usage face au renchérissement du mésusage. Pourquoi paye-t-on son eau le même prix pour son ménage ou remplir sa piscine privée ? Ce qui vaut pour l’eau s’impose aussi pour l’ensemble des biens communs. Troisième règle : il ne s’agit surtout pas de rendre gratuits les produits existants mais d’utiliser le passage à la gratuité pour repenser les produits/services. C’est vrai pour la gratuité de la restauration scolaire qui doit permettre d’avancer vers une alimentation relocalisée, resaisonnalisée, moins gourmande en eau, moins carnée, une cuisine faite sur place et servie à table ; c’est vrai aussi pour la gratuité de l’eau et de l’énergie élémentaires, des services culturels et funéraires, du logement social, des services de santé, des transports en commun, etc. On ne pourra cheminer vers une civilisation de la gratuité que si on avance sur trois jambes, l’égalité sociale, la transition écologique et l’implication citoyenne. Le livre « Gratuité vs capitalisme » prouve que le bilan de la gratuité est bon socialement, écologiquement mais beaucoup plus faible sur le plan politique.

La gratuité a pourtant besoin de comités d’usagers pour permettre d’avancer sérieusement vers une société des usagers maîtres de leurs usages.

Toutes les expériences le prouvent, loin d’inciter au gaspillage, la gratuité responsabilise, c’est vrai, par exemple, en matière de consommation d’eau. La gratuité des médiathèques prouve aussi qu’il est possible d’avancer vite. Lorsqu’une médiathèque est payante, chacun se conduit comme un consommateur en voulant pour son argent, en empruntant le maximum. Lorsque la même médiathèque devient gratuite, on assiste à une forte augmentation du nombre d’abonnés, mais à une diminution de 30 à 40 % du nombre d’emprunt, signe que l’abonné entre davantage dans un rapport d’usage que de consommation.

L’heure est donc à multiplier les ilots de gratuité afin d’en faire demain matin de nouveaux archipels et après demain de nouveaux continents. Ce combat ne trouve pas son origine dans nos têtes mais dans les formes de vie pré- et post-capitalistes existantes, dans les mobilisations populaires qui se développent. La gauche est née au début du XXe siècle en inventant le socialisme municipal. La gauche renaitra au début du XXIe siècle en inventant un éco-socialisme municipal dans lequel la question de la gratuité occupera une place centrale. La gratuité est non seulement plus réaliste économiquement que le revenu universel, puisqu’elle coûte six fois moins chère pour les mêmes services, mais davantage émancipatoire car rien n’empêcherait de dépenser son revenu universel pour acheter de sales produits sociaux, écologiques ou politiques, alors que toute extension de la sphère de la gratuité renforce la démarchandisation, la démonétarisation mais aussi la définition collective des besoins.

Paul Ariès

Politologue, directeur de l’Observatoire International de la Gratuité (OIG), auteur de « Gratuité vs capitalisme » (éditions Larousse, septembre 2018).

Politique

22-Jan-2019 Par

Quel futur pour le Conseil National des Etrangers?

Le CNE demeure le seul organe dédié à défendre les intérêts des étrangers au Luxembourg. N’ayant pas accès à la Chambre des Députés, les étrangers ne peuvent compter que sur le CNE pour faire valoir sa voix au niveau institutionnel. Cela dit, il faut noter que la Constitution luxembourgeoise nous établit que « [la] Chambre des Députés représente le pays », et, par conséquence, tous ses citoyens. Ce n’est donc pas du ressort du CNE de représenter les étrangers.

Quel futur pour le Conseil National des Etrangers?

La loi

Le Conseil National pour Étrangers (CNE) a été créé en 1993 par la loi portant sur l’intégration des étrangers. La loi, révisée en 2008, établit que le CNE « est un organe consultatif chargé d’étudier, soit de sa propre initiative, soit à la demande du Gouvernement les problèmes concernant les étrangers et leur intégration ». Cette formulation est la même dans la loi de 1993 et dans celle de 2008.

Allant un peu hors de thème, cette formulation est, dans son contenu, la même qui a créé le Conseil Economique et Social : le CES « est un organe consultatif qui étudie à la demande du Gouvernement ou de sa propre initiative les problèmes économiques, sociaux et financiers intéressant plusieurs secteurs économiques ou l’ensemble de l’économie nationale ».

Mais la similarité se termine ici. Prenons les dotations budgétaires. Le CNE a été attribué un total de quinze mille euros (15.000€), tandis que le CES se voit attribuer plus d’un million d’euros (1.107.443€). C’est une relation de 1 à 74. Sans vouloir comparer ni la taille ni la complexité de l’activité des deux organisations, l’écart entre les deux valeurs démontre l’importance que le gouvernement (qui propose le budget) et la chambre (que l’approuve), ainsi que les partis y présents, attribuent au CNE.

Le CNE aujourd’hui

Le CNE, dans sa composition actuelle, comprend 22 membres élus (3 nationaux portugais, 2 français, 1 italien, 1 belge, 1 allemand, 1 britannique, 1 néerlandais, 5 membres d’autres pays de l’UE, 7 membres du reste du monde) et 1 représentant des réfugiés, 1 du SYVICOL, 4 des organisations patronales (actuellement un de chacune des suivantes : Union Luxembourgeoise des Entreprises Luxembourgeoise, Confédération Luxembourgeoise du Commerce, Association des Banques et Banquiers Luxembourgeois, et Chambre des Métiers), 4 des organisations syndicales les plus représentatives (dans ce CNE : 1 LCGB, 2 OGBL et 1 CGPF) et deux représentants de la société civile. Tous ses membres ont le droit de vote. Chacun de ses membres à un suppléant « personnel » – c.à.d. si un des élus portugais abandonne le CNE et se fait remplacer par son suppléant il ne reste personne pour remplacer celui-ci, amputant ainsi le Conseil d’un membre avec un possible impacte négatif dans son quorum.

Lors de sa réponse à la question parlementaire 3312 par Marc Angel, le 10 octobre 2017, Mme le Ministre Corinne Cahen annonce qu’elle « envisage de saisir le CNE (…) d’un travail de réflexion sur les éventuels changements à prévoir ». Le 1erfévrier 2018, en réponse à David Wagner (QP 3547) Mme le Ministre renforce sa volonté de saisir « le CNE d’une réflexion sur ses missions et sur son mode de fonctionnement ». Dans la même réponse il est annoncé que « le CNE a été doté d’un budget de fonctionnement ». Plus tard, après avoir été questionnée par Mme Martine Hansen (QP 3929), Mme Cahen confirme que « [lors] de la réunion plénière du 28 février 2018, à laquelle [elle a] assisté, [Mme le ministre a] demandé au CNE de mener une réflexion sur ses missions et sur son mode de fonctionnement ». Mme le Ministre rajoute que « ces réflexions sont actuellement en cours », sachant qu’il faut plus qu’une affirmation politique pour produire un fait.

Les enjeux

Le CNE demeure le seul organe dédié à défendre les intérêts des étrangers au Luxembourg. N’ayant pas accès à la Chambre des Députés, les étrangers ne peuvent compter que sur le CNE pour faire valoir sa voix au niveau institutionnel. Cela dit, il faut noter que la Constitution luxembourgeoise nous établit que « [la] Chambre des Députés représente le pays », et, par conséquence, tous ses citoyens. Ce n’est donc pas du ressort du CNE de représenter les étrangers.

Le rôle du CNE est d’aviser le gouvernement dès que saisi mais aussi de « présenter (…) toute proposition qu’il juge utile à l’amélioration de la situation des étrangers et de leur famille ». Il en ressort que ne les représentant pas, rôle exclusif de la Chambre, le CNE doit quand même rester lié aux étrangers. Il est « un organe consultatif essentiel pour accompagner le Gouvernement dans ses réflexions et ses efforts pour ses doter d’instruments afin de faciliter l’intégration des ressortissants étrangers dans la société luxembourgeoise » (Mme Cahen, réponse QP 3547).

Sans considérer le CNE, la défense des intérêts des étrangers se fait, de façon plus ou moins atomisé, par ses organisations civiques. La comptabilisation de tous les « associations des étrangers régulièrement constituées et ayant une activité sociale, culturelle ou sportive ainsi que des associations œuvrant, à titre principal, en faveur des étrangers » est une tâche impossible, mais nous pouvons, avec toute sécurité, les estimer à quelques centaines. La représentation des intérêts des étrangers au-delà de la Chambre, comme pour n’importe quel groupe social, se fait, spontanément, par sa liberté d’association et d’organisation. Promouvoir le CNE comme un représentant des étrangers c’est mettre en question, d’abord la Constitution luxembourgeoise et, par conséquence, la Chambre, mais aussi le droit fondamental dont « [t]oute personne a droit à la liberté de réunion et d’association pacifiques », et à aspirer à ce que ce droit soit conséquent.

Le futur

En ce qui concerne la réflexion sur le fonctionnement du CNE, il y a quelques avant-propos à tenir en compte, notamment sur quel est le rôle du CNE, sa composition, qui l’élit et comment l’élire.

Le Conseil National pour Étrangers doit être un confédérateur des enjeux des étrangers organisés de façon volontaire et autonome dans ces mouvements civiques, et les faire valoir auprès du gouvernement dans le cadre des institutions gouvernementales du Grand-Duché.

L’exigence de ne pas avoir la nationalité luxembourgeoise pour être élu au CNE était introduite avec la loi de 1993 – qui a aussi ‘converti’ le Conseil National de l’Immigration en Conseil National pour Étrangers. Cette conversion est explicitée, dans l’exposé de motifs du projet de loi débouchant dans la loi de 1993 sur l’intégration des étrangers, dans un chapitre intitulée « Amélioration des voies consultatives pour étrangers ». Il est subjacent le désir de donner une voie pour la défense des intérêts de ceux qui n’ont pas d’autre façon de s’exprimer officiellement auprès du gouvernement. Revenir en arrière sur ce point serait une décision à l’encontre de la réalité migratoire et frontalière au Luxembourg. Il faut creuser plus profondément dans cette direction et aller jusqu’au point de prévoir que des frontaliers puissent aussi être présents au CNE.

Dans le même texte mentionné au paragraphe antérieur nous pouvons lire que « le service d’immigration a (…) peu de contacts avec les associations d’étrangers ». Ce constat a été à l’origine du choix de charger ces associations avec l’élection des ressortissants étrangers siégeant au CNE. Ceux présents dans la 1èreRencontre entre le CNE et les associations le 24 novembre 2018 ont peut entendre, entre autres, des plaintes sur la difficulté d’accès des associations des étrangers aux institutions officielles. Cette plainte est, d’ailleurs, bien connue par tous ceux immergés dans le monde associatif des étrangers. La solution, comme suggéré plus haut, de voir dans le CNE (aussi) une sorte de confédération des enjeux des étrangers est en ligne avec le souhait « d’une revalorisation de la vie associative des étrangers » et « [d]’établir, par ce biais, un contact entre [le CNE] et les associations d’étrangers ».

L’argument contre le suffrage direct

Parmi les idées qui sont récemment devenues publiques sur le futur du CNE il y a une qui attire beaucoup d’attention : l’élection par suffrage universel des étrangers. L’idée d’un suffrage universel parmi les étrangers (certains y rajoutent ceux inscrits sur les listes électorales aux communales) est intéressante. Ça donnerait une vraie représentativité aux étrangers. Sauf que, cette pratique (1) serait contraire à l’esprit de tout le processus créateur du CNE et (2) aiderait à promouvoir le déficit démocratique au Luxembourg : c’est pour la chambre que les étrangers doivent voter pour se faire représenter et non pas pour un organe qui n’a qu’un rôle consultatif et est, visiblement, méprisé par la structure administrative et politique à laquelle il est attaché.

Mais, supposons que oui, que l’élection du CNE se fasse désormais par le vote universel des étrangers. La question qui s’impose est : qui seront alors les candidats ? Dans le modèle actuel tout résident étranger peut se porter candidat. Avec le suffrage universel un candidat désirant d’être élu, ce qui semble être tout à fait un désir normal, devrait conduire une campagne électorale dans tout le pays. La division du territoire en circonscriptions ne serait jamais compatible avec un organe si petit que le CNE.

Qui alors peut se permettre cette extravagance ? Les seuls candidats possibles seront ceux sortis des rangs des partis ou des syndicats. Une candidature nationale nécessite une campagne nationale, avec les coûts et la complexité associés. Or, il est de fait que les partis ont déjà leur représentation à la Chambre des Députés et les syndicats à la Chambre des Salariés. Un suffrage universel est le déni du principe fondamental du CNE : donner une voix aux enjeux de ceux qui n’en ont pas d’autre façon.

Le résultat final serait d’avoir un CNE dont le débat ne serait plus qu’une chambre de résonance du parlement national.

Both the left and the far right make advances in Swedish elections

The Swedish elections last Sunday turned out to be an extremely even affair, giving the two blocs of traditional political forces, the four party strong right wing group, ”the Alliance” and the social democratic and Green government and its supporting force, the Left Party, almost exactly the same number of seats.

Both the left and the far right make advances in Swedish elections

The Swedish left advances in the elections but as a whole Parliament swings more to the right.

The Swedish elections last Sunday turned out to be an extremely even affair, giving the two blocs of traditional political forces, the four party strong right wing group, ”the Alliance” and the social democratic and Green government  and its supporting force, the Left Party, almost exactly the same number of seats.

Jonas Sjöstedt, leader of Vänsterpartiet (the Left Party), declared on election night that the elections represented a great success for the left. He explained that it was only due to the increased votes of the left that the Swedish progressives have the remotest chance of staying in power, since both the social democrats and the Greens took heavy tolls. For a while it even looked as if the Greens would not make it over the 4% barrier that is necessary to get any seats at all. In the end they got 4.3%, a mere 20,000 votes above the barrier.

Vänterpartiet conducted a very strong election campaign and ended up with 7.9% of the votes, gaining 2.2% compared to the previous elections. Perhaps even more positive is a huge influx of new members, making the party reach 25,000 members for the first time in its history. An astonishing 428 new members joined on a single day, according to the Party secretary Aron Etler. The party also performed very well in the three major cities.

Swedish politics have been a strange affair for the last four years. Despite a strong right-wing majority in parliament the country has had a Social-democratic and Green government. The reason for this was that the traditional right has managed, or as some may say, been forced, to keep the doors closed to the nationalists of the Swedish Democrats party, refusing to cooperate with them at all. This went to the point where they would even rather lose votes in Parliament than accept support from the far right. This very remarkable and positive policy might however now be at end, since at least two of the four parties of the traditional right have declared themselves willing to open a dialogue with the far right.

The results show a new situation in Swedish politics, where we can begin to determine three political blocs instead of the traditional two. To the right a neoconservative block with the traditional conservatives, the Christian Democrats and the far right, in the middle the two liberal parties and to the left Vänsterpartiet, the social democrats and the Greens. Which road the country now takes depends on whether the two liberal parties are willing to stay in their alliance with the right, despite influence from the far right, or whether this is a deal breaker for them and they decide to give their support to the left instead. If they do there is a good chance of a new social democratic government, but unfortunately, with less influence for the left, despite the good election result.

International

20-Sep-2018 Par

Construire un avenir résilient au Luxembourg

Notre pays comme le reste du monde est à la croisée des chemins, il nous apparaît pertinent d’enfin faire le bilan de décennies d’un libéralisme dogmatique qui met en péril - à court terme - notre économie et plus globalement nos modes de vie.

Construire un avenir résilient au Luxembourg

Notre pays comme le reste du monde est à la croisée des chemins, il nous apparaît pertinent d’enfin faire le bilan de décennies d’un libéralisme dogmatique qui met en péril – à court terme – notre économie et plus globalement nos modes de vie.

Le club de Rome, les rapports Meadows, l’appel des 1500 scientifiques, sont autant de rappels à notre devoir de prendre en compte, en tant que société, les limites physiques de notre environnement. Il nous appartient de cultiver notre résilience, c’est-à-dire notre capacité à résister et à nous adapter à des chocs externes (changement climatique, hausse du prix de l’énergie, appauvrissement des sols, crises économiques et migratoires).

Nous nous félicitons du fait que notre pays comptera parmi ceux qui vont respecter leurs engagements Kyoto pour 2020, mais cela n’est pas suffisant. Le Luxembourg aura montré qu’il a la capacité de diminuer ses émissions de gaz à effet de serre. Il est à présent temps de nous préparer au monde de demain.  Les énergies renouvelables, l’agriculture biologique, l’écomobilité ou le tourisme éco-responsable sont autant de sources d’emplois qualifiés et de valeur ajoutée où nous nous devons d’être pionniers.

Pour cela, il nous faut rompre radicalement avec les anciennes façons de penser. Le court-termisme ne doit plus être notre horizon. Il est temps d’inventer l’avenir, pour donner à nos contemporains l’envie de s’y projeter et ainsi couper l’herbe sous le pied des mouvements populistes qui autour de nous se réjouissent de notre immobilisme.

En tant que parti progressiste, en lien avec les acteurs de la société civile, nous nous proposons de porter avec vous un projet de société qui soit visionnaire, durable, écoresponsable, fondé sur une justice sociale non négociable, et une vision de notre avenir désengorgée d’un pessimisme qui n’est ni approprié ni constructif.

Il y va de notre responsabilité historique d’être au rendez vous en tant que nation. En synergie avec nos partenaires européens, nous nous devons de mutualiser nos efforts pour défendre nos biens communs (l’eau, l’air, l’alimentation, le vivant) ainsi que nos démocraties.

Pour cela nous nous devons d’agir à tous les échelons (local, national, international) par le biais d’aides publiques et d’une fiscalité incitative, mais aussi de politiques agricoles et industrielles renouvelées et relocalisées qui prennent en compte nos écosystèmes.

C’est aujourd’hui que nous devons nous préparer et anticiper notamment nos besoins en termes de formation et d’éducation des jeunes et des adultes aux métiers correspondant à la bifurcation écologique indispensable que nous appelons de nos vœux. C’est aujourd’hui aussi que nous devons rétablir un réseau efficace de services publics de proximité. C’est aujourd’hui enfin que l’on se doit d’amener ces questions sur la place publique et dans le débat politique, pour que l’inaction et le fatalisme soient enfin surmontés.

Politique

20-Sep-2018 Par

Vacances du Grand-Duc au Sahara occidental occupé: le gouvernement doit prendre ses distances.

Ces derniers jours, les utilisateurs de facebook au Luxembourg ont pu régulièrement voir s’afficher des « publications suggérées » faisant état du séjour de kitesurfing de « SAR le Grand-Duc Henri de Luxembourg à l’hôtel Dakhla Attitude au Maroc ». Il est sidérant que le chef de l’État, fût-ce en agissant à titre purement privé (mais est-ce seulement possible, eu égard la lettre de notre Constitution?), ait pu se laisser instrumentaliser de la sorte pour les besoins de propagande d’une puissance étrangère.

Vacances du Grand-Duc au Sahara occidental occupé: le gouvernement doit prendre ses distances.

Ces derniers jours, les utilisateurs de facebook au Luxembourg ont pu régulièrement voir s’afficher des « publications suggérées » faisant état du séjour de kitesurfing de « SAR le Grand-Duc Henri de Luxembourg à l’hôtel Dakhla Attitude au Maroc ».

Il est sidérant que le chef de l’État, fût-ce en agissant à titre purement privé (mais est-ce seulement possible, eu égard la lettre de notre Constitution?), ait pu se laisser instrumentaliser de la sorte pour les besoins de propagande d’une puissance étrangère.

Il faut en effet rappeler que Dakhla n’est pas situé au Maroc, mais au Sahara occidental. En effet, pour la communauté internationale, le Sahara occidental ne fait pas partie du Maroc, mais constitue un territoire séparé et distinct de celui-ci (et non pas un territoire simplement disputé), comme l’a d’ailleurs rappelé la Cour de Justice de l’Union européenne dans plusieurs décisions récentes. Le Maroc, qui a envahi et annexé cette ancienne colonie espagnole en 1975, privant le peuple sahraoui de son droit à l’autodétermination, y pratique une occupation militaire illégale au regard du droit international.

Selon les rapports des principales ONG et autres observateurs internationaux, le régime d’occupation marocain au Sahara occidental donne lieu à de très nombreuses et graves violations des droits de l’homme. Rappelons aussi que des enquêtes judiciaires espagnoles ont relevé l’existence de faits de génocide commis par le Maroc au Sahara occidental lors de l’invasion du territoire.

En se rendant au Sahara occidental et en acceptant de servir, fût-ce à son insu, de caution à l’occupant marocain, le Grand-Duc contribue rendre plus difficile la reprise des négociations de paix lancées sous l’égide de l’ONU entre l’occupant marocain et le Front POLISARIO, représentant légitime du peuple sahraoui.

Par conséquent, il paraît pour le moins souhaitable que le gouvernement luxembourgeois, historiquement opposé à l’occupation des petites nations par les grandes et se disant engagé en faveur du respect des droits de l’homme et du droit international humanitaire :

(1) se distance formellement du voyage accompli à Dakhla par le chef de l’État et de prendre les dispositions nécessaires pour que ce type d’incident ne se reproduise à l’avenir (il est d’ailleurs à espérer que le gouvernement luxembourgeois n’a pas contribué à l’organisation de ce voyage en se chargeant des formalités de visa pour le compte de la famille grand-ducale) ;

(2) rappelle que le Luxembourg, en application de ses obligations au titre du droit international et en exécution de la jurisprudence de la CJUE, ne reconnaît pas la souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental ;

(3) s’engage pour la reprise des pourparlers sous l’égide de l’ONU en vue de l’autodétermination du peuple sahraoui.

Par ailleurs, on ne peut manquer de voir dans cet incident une nouvelle illustration des limites inhérentes au régime de la monarchie constitutionnelle. Celle-ci, en liant l’image de tout un pays à celle d’une famille régnante, débouche inévitablement sur un brouillage peu opportun et peu démocratique entre l’État et la vie privée du chef de l’État.  C’est précisément pour éviter cette confusion que le projet alternatif pour une Constitution du Luxembourg élaboré par déi Lénk prévoit l’abolition de la monarchie et l’instauration d’une République dont la présidence, au rôle étroitement circonscrit et située au-dessus des partis, serait confiée à tour de rôle à une femme et à un homme issu.e du corps des citoyens ordinaires.